Des produits techniques et complexes
à ne pas mettre entre toutes les mains !
Soumis à REACH et au règlement Biocides (comme leurs homologues destinés au nettoyage ou à l’hygiène) les produits dédiés
à la 3D, insecticides et rodenticides notamment, demeurent très complexes. Pour des questions évidentes de sécurité,
mais aussi d’efficacité, ces spécialités doivent être appliquées par des professionnels dument formés sachant aller au-delà
de la seule opération d’application. Combattre des rongeurs ou des blattes nécessite un audit sérieux des sites à traiter
et une bonne connaissance des nuisibles.
Présente sur le marché français depuis 1992, la société Aedes, basée à Saint-Gratien en région parisienne, est spécialisée dans la distribution de produits biocides à destination des professionnels 3D. « Nous avons une équipe composée de technico-commerciaux spécialistes de la maîtrise des nuisibles qui aussi peuvent être amenés à intervenir directement sur les chantiers en accompagnement. Nous sommes sur un marché de produits très techniques avec des contraintes réglementaires de plus en plus fortes. Nous devons intégrer des aspects toxicologiques et environnementaux », constate Abdelkarim Alghourfi, directeur d’exploitation de la société Aedes qui est également présente sur le secteur de la 3D au titre d’organisme de formation. Ces paramètres poussent à toujours plus de vigilance de la part des professionnels et impose un conseil clair et appuyé de la part du distributeur. De plus, les professionnels ont besoin d’actualiser leurs connaissances et de suivre des modules spécifiques pour obtenir leur certificat d’applicateur.
« En ce qui concerne les produits, nous avons affaire à des familles bien déterminées, avec une innovation limitée sur l’arsenal chimique compte tenu du strict encadrement des réglementations Biocides et Reach. Un premier examen européen (toujours en cours) vise à écarter du marché les molécules les plus défavorables pour l’environnement. À cela s’ajoute l’étude des produits eux-mêmes, sur la base d’un dossier de soutien très complexe, avant d’aboutir à l’obtention d’une AMM Biocide (Autorisation de Mise sur le Marché). Cette évolution conduira tout naturellement à une baisse du nombre de produits disponibles, la volonté du législateur européen étant d’inciter l’utilisation de solutions de substitution comme le piégeage, la lutte intégrée ou le monitoring qui permet de ne pas avoir recours systématiquement à la lutte chimique. C’est également une tendance qui se dessine auprès des donneurs d’ordres exigeant parfois de leurs prestataires un recours minoré aux formulations chimiques », poursuit le responsable d’Aedes.
Une bio-activation originale
Le principe de précaution préconisé ici connaît toutefois ses limites : les anticoagulants rodonticides (communément appelés « raticides ») n’ont pas disparu du paysage, car à ce jour il ne semble pas exister de produits ou de méthodes aussi durablement efficaces contre les rats et les souris. La « Directive 98/8» Biocides devenue désormais « Règlement 528/2012» instaure un programme d’examen et de surveillance attribuera une AMM de 5 ou 10 ans aux produits de 3D. L’Advion gel exclusivement distribué par Aedes, est la première spécialité insecticide à avoir obtenu son homologation biocide (ou AMM) jusqu’en 2021, grâce notamment à son profil toxicologique beaucoup plus favorable. En effet ce gel appât pour les blattes à base d’indoxacarbe ne présente quasiment pas de risque d’intoxication primaire : c’est l’insecte lui-même qui déclenche la matière active après ingestion du gel. Cette bio-activation est permise par un métabolisme interne propre aux insectes. C’est en retournant dans leur nid pour mourir que les blattes ayant ingéré Advion produiront des sécrétions extrêmement appétentes, mais fatales pour leurs homologues. Le taux de mortalité par contamination secondaire sera alors exponentiel et très important.
« Ce type de produit a vraiment le vent en poupe, car il est très efficace et répond parfaitement aux exigences de nos clients et de leurs donneurs d’ordres. De plus, l’homologation du produit lui confère une autorisation d’usage pérenne et valable dans de nombreuses situations (industries, habitations, écoles, hôpitaux…) », assure Abdelkarim Alghourfi.
Il ne suffit pas de poser le produit
Dans la notion de sécurité alimentaire « de la fourche à la fourchette », ou dans le maintien de la continuité des activités de l’être humain, le prestataire de service 3D occupe une place très importante. Une infestation chez un industriel ou un restaurateur va présenter un risque, d’où la nécessité de maîtriser les populations nuisibles en les ramenant à un très faible niveau. Les donneurs d’ordres oublient parfois cela et font le sacrifice de la qualité pour privilégier le prix, ce qui se traduit bien souvent par une baisse du temps accordé durant les interventions et, du coup, une baisse de l’efficacité des traitements.
« Le rôle du technicien 3D n’est pas seulement de poser du produit. Il suit l’évolution des populations nuisibles, il analyse les risques, il scrute, piste, préconise… Ajoutez à cela la pression réglementaire et la saisonnalité des infestations, vous aurez ainsi un aperçu de la technicité du métier. Il incombe donc aux professionnels, fabricants et distributeurs en particulier de promouvoir la meilleure méthodologie d’emploi possible pour les produits », conclut le responsable d’Aedes.
Expertise dans l’application
Selon les données de la chambre syndicale 3D (CS3D) pour l’exercice 2011, quelque 1200 entreprises réalisant 800 millions d’euros de chiffre d’affaires exercent leur activité dans le domaine de la 3 D. 60 % de ces sociétés comptent moins de 10 salariés et 33 % n’en comptent aucun. Autant dire que l’activité est plutôt entre les mains de petites structures, même si la moitié du chiffre d’affaires est réalisée par les entreprises fortes de 31 salariés et plus. Autre particularité des professionnels du secteur : la prestation de service n’est pas la seule source de revenus, même si celle-ci est largement majoritaire. En effet, 2 % de ces entreprises ont une activité de distribution de produits uniquement et 16% exercent les deux activités.
Radical 3D la société créée en 2010 dans l’Essonne par Karine Boulligny fait partie des 15 % de sociétés installées en Ile-de-France. Moins de 10 salariés jusqu’à présent, des activités en conformité avec la moyenne du secteur, tout pour afficher une belle « normalité »… Tout ou presque, à un détail près que ne manque pas de noter l’entrepreneuse : « Il y a peu de femmes dans cette activité ! » Après un parcours de plusieurs années dans l’univers de la distribution des produits et matériels d’hygiène, la jeune femme tente l’expérience sur un secteur qu’elle juge suffisamment technique pour faire la différence. Bonne connaissance des produits, analyse en amont des infestations, expertise dans l’application, sans oublier la dimension commerciale du métier. Tous les ingrédients sont réunis pour permettre un développement satisfaisant. Plus que satisfaisant même si on en croit l’évolution de l’activité. « En 2010 et 2011, l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 50 k€, qui a atteint 135 k€ en 2012. Au mois de juillet dernier nous étions déjà à plus de 400 k€. Cette croissance qui va me permettre d’embaucher s’explique par la reprise de marchés importants, notamment dans le secteur du logement social où la demande est importante et l’attente des bailleurs très forte. Il ne suffit pas de vendre et d’appliquer des produits, nous avons une obligation de résultat, de suivi, de réactivité, quand tout un bâtiment est infesté de cafards ! », insiste Karine Boulligny. Le savoir-faire passe d’abord par un audit le plus précis possible de la situation.  
Recrudescence des cafards
Pour la majorité des professionnels de la propreté et du nettoyage industriel, l’outil le plus fiable et le plus adapté aux détergents sous forme concentrée demeure la centrale de dilution. « Pas de contact avec l’utilisateur, pas de possibilité de surdoser en rajoutant deux ou trois doses de plus dans le seau ou le bac de l’autolaveuse, mise à disposition de la juste quantité de produit final, mais aussi la possibilité – pour le moins intéressante – de travailler avec deux, trois ou quatre produits sur la centrale de dilution. Il n’y a pas photo, il s’agit vraiment de la solution la mieux adaptée à condition de bien l’utiliser, de bien calibrer le nombre de centrale en fonction de l’étendue du site et d’assurer une maintenance adaptée des machines ! » conclut Renault Lemproi.
Écocaps, verte, concentrée et hydrosoluble
Appartements, cages d’escaliers, locaux techniques chaque espace doit être analysé, photographié et planifié pour un traitement. Par ailleurs, de plus en plus fréquemment l’intervention se fait sur injonction des services municipaux sur des logements frappés d’insalubrité. « En 15 jours nous devons être capable de rendre un appartement habitable, cela comprend bien entendu le traitement et l’éradication des nuisibles, mais aussi la remise en état des lieux. Nous allons jusqu’à la peinture ou la pose de papier peint blanc. » Aujourd’hui l’entreprise compte 7 applicateurs, dont la gérante de la société. La connaissance des molécules, des matières actives, mais aussi des modes d’application est primordiale. Dans certaines circonstances, sur certains types d’infestations une matière active donnera de très bons résultats sous forme de poudre, ailleurs elle sera plus efficace encapsulée. « Nous observons une très forte recrudescence des cafards, notamment à cause de problèmes d’hygiène. Certaines spécialités comme le Goliath gel des laboratoires BASF ou l’Advion, un gel appât formulé par Dupont donnent de bons résultats » conclut Karine Boulligny.
Produits en ligne : attention danger !
Le site internet porte le nom évocateur d’Alibaba, mais il ne faut guère se fier à cette caverne chinoise qui est tout sauf magique. « C’est hallucinant de pouvoir trouver en ligne et aussi facilement des produits aussi techniques et sensibles en vente totalement libre, condamne Karine Boulligny (Radical 3D). Il est évident que c’est une source d’approvisionnement intéressante pour les gens qui pensent pouvoir traiter leur problème de nuisibles à peu de frais. On rencontre malheureusement un certain nombre de ces produits, achetés sur internet ou rapporté à l’occasion d’un voyage au Maghreb ou en Afrique par exemple.
Ils sont beaucoup moins chers, mais ils ne présentent aucune garantie en termes d’efficacité bien sûr, mais aussi et surtout d’un point de vue toxicologique pour les utilisateurs et les personnes chez qui ils vont être posés. À cela s’ajoute
la question des déchets et de leur traitement qui est aussi très sensible dans notre profession »
Certibiocides
La mise en œuvre par des professionnels des produits biocides sera conditionnée,
à terme, par la détention d’un certificat individuel, dit “certibiocides”, sur lequel la Chambre syndicale 3D est en train de travailler avec les deux Ministères concernés (Environnement et Agriculture). Cette certification, lorsqu’elle sera mise en œuvre, ne pourra être obtenue que par les personnes déjà titulaires d’un « certiphyto ». En effet, cette option biocides sera directement rattachée au « certiphyto » et en sera donc un complément. « Ce module serait obtenu à l’issue d’une journée de formation pour l’activité “utilisateur professionnel et distribution de certains types de produits biocides destinés exclusivement aux professionnels”. Cette formation se ferait autour des thèmes suivants : réglementation, mise en œuvre des produits rodenticides, mise en œuvre des produits désinfectants, mise en œuvre des produits insecticides, gestion des déchets » note les responsables de la CS3D.
Bientôt un drone pour traiter
les nids de frelons asiatiques ?
La société France Frelons, installée dans les Landes s’est associée à une PME de Mont-de-Marsan, Vision Scope, pour développer et tester un drone télécommandé, spécialement conçu pour s’attaquer aux nids de frelons asiatiques qui prolifèrent depuis 10 ans déjà. Grâce à cet engin baptisé Joker et d’un poids de 4 kg, l’opérateur peut s’approcher au plus près des nids et injecter dans ceux-ci la matière active (perméthrine) qui sera ensuite diffusée par les insectes eux-mêmes. Une expérimentation menée durant l’été dans le sud-ouest a permis de confirmer l’intérêt d’un tel engin, facilement manipulable depuis le sol, sans protection particulière. Ce drone, développé à partir du projet Wadudu, mis en œuvre par Vision Scope bénéficie du concours de chercheurs d’entreprises spécialisées dans la lutte contre les insectes, mais aussi d’équipes du CNRS. Joker devrait connaître un fort développement pour la campagne de lutte contre les frelon 2014, en remplaçant de façon efficace les perches utilisées jusqu’à présent pour atteindre les nids, mais dont l’utilisation n’était pas toujours possible ou aisée (dans les conduits de cheminée par exemple). Le frelon asiatique, introduit dans le sud-ouest de la France en 2004 via un conteneur de poterie en provenance de Chine est présent désormais sur les 2/3 du territoire. Sans ennemi ni prédateur sa progression est d’environ 100 km par an. Il y a un an le frelon asiatique a été classé comme danger sanitaire de 2è catégorie par les Pouvoirs Publics, faisant depuis le mois de mai dernier l’objet d’un plan de lutte et de prévention spécifique autour des ruchers.